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Le Havre, odyssée d'une ville de combats et de renaissance

Tournée vers l’Atlantique, refaçonnée par Auguste Perret après la Seconde Guerre mondiale, la ville est un bastion de la lutte sociale et un éminent témoin de l’histoire récente. C’est aussi le symbole d’un renouveau urbain, industriel et culturel.

Il est aujourd’hui le deuxième plus grand port de France et le premier quant au trafic de conteneurs. Le Havre revient pourtant de loin. Tout bascule en 1944, lorsque l’occupant nazi, qui a la mainmise sur la ville et sur son port ultra-stratégique depuis quatre ans, refuse de se rendre face aux sommations du commandement britannique. Le 5 septembre, les troupes alliées déclenchent alors un enfer de feu. Pendant près d’une semaine, 10 000 tonnes de bombes sont larguées sur la ville, avant le lancement de l’opération « Astonia », le 10 septembre, au terme de laquelle les Allemands, dominés sur terre et par les airs, sont contraints de capituler.

Le 12 septembre 1944, Le Havre est définitivement libéré, mais à quel prix.La cité océane est en ruines et le bilan est tragique : plus de 12 000 bâtiments ont été détruits, 5 000 personnes ont perdu la vie et plus de 80 000 autres doivent désormais être relogées ou déplacées.

Un cœur en béton

En attendant que la ville soit remise sur pied, les sinistrés sont répartis entre les camps militaires américains du centre-ville, de la forêt de Montgeon et celui de Gonfreville-l’Orcher, ainsi que dans des cités provisoires. Auguste Perret est désigné par le gouvernement d’après-guerre pour permettre au Havre de renaître de ses cendres. La renommée de l’architecte n’est plus à faire, Perret est un pionnier de l’utilisation du béton armé, un matériau solide, durable, résistant au feu et surtout bon marché, un gros avantage à l’heure où le pays est en proie à d’importantes pénuries.

Les 150 hectares du centre-ville deviennent un gigantesque chantier, qui durera près de deux décennies. Auguste Perret, qui meurt le 25 février 1954, n’en verra pas la fin. Si les traces de son travail sont évidemment visibles en déambulant au gré des rues et avenues havraises reconstruites selon un plan orthogonal, un lieu révèle toute l’essence du style de l’architecte : l’Appartement témoin. Construit en 1949 et reconstitué en 2006, il servait de logement type afin de présenter les concepts architecturaux et les aménagements intérieurs proposés dans les nouveaux immeubles.

Il est désormais un musée ouvert au public, dans lequel on découvre, lors d’une visite guidée, l’approche très moderne d’Auguste Perret, entre objets d’époque et mobilier de grands designers comme René Gabriel, choisi par le ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme pour créer un mobilier d’urgence, robuste et rendu accessible grâce à la production en série. Depuis 2005, le centre-ville du Havre est inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco.

Le port, lieu de lutte et d’injustice

Si la page de la reconstruction a officiellement été refermée en 1964, l’aménagement et la transformation urbaine du Havre ne se sont pas arrêtés là. Parmi les figures de ce renouveau, l’architecte brésilien Oscar Niemeyer. En 1978, André Duroméa, maire communiste de la ville, l’invite à concevoir un centre culturel dans le quartier Saint-Roch. Parmi ses précédents faits d’armes, la réalisation du siège du PCF, situé place du Colonel-Fabien à Paris, définitivement achevé en 1980.

En parallèle, au Havre, Niemeyer fait sortir de terre un édifice circulaire destiné à accueillir les nouveaux locaux de la première maison de la culture en France. Inaugurée en 1982, la structure, rebaptisée « le Volcan » pour sa forme en 1990, sera labellisée scène nationale un an plus tard. Juste à côté, le « Petit Volcan » abrite la bibliothèque Oscar-Niemeyer. Vu du ciel, l’ensemble dessine la colombe de la paix. Sur sa lancée, Oscar Niemeyer crée l’ancien siège de « l’Humanité », inauguré en 1989 à Saint-Denis.

À quelques minutes du Volcan, le port est, lui aussi, témoin du temps et surtout de l’histoire ouvrière du Havre, bastion de la lutte sociale et syndicale des dockers et des charbonniers. Un lieu où les grèves ont marqué l’histoire locale et où la répression fut sévère, comme en témoigne en 1910 l’affaire Jules Durand, secrétaire du syndicat des charbonniers affilié à la CGT, injustement condamné à mort pour complicité lors du meurtre d’un chef d’équipe non gréviste.

Soutenu, entre autres, par Jean Jaurès, il obtient la grâce présidentielle et est finalement condamné à sept ans de prison. Libéré en 1911 mais brisé, il est interné à l’asile de Sotteville-lès-Rouen, où il s’éteint en 1926. Devenue un symbole de lutte contre l’injustice et pour les droits des travailleurs, l’affaire Durand a renforcé la défiance ouvrière envers les institutions, comme en témoigne la grève des métallos en 1922, ainsi que celles de 1936 et de 1968. Bien que la désindustrialisation ait, depuis, affaibli le monde ouvrier, l’esprit de lutte demeure fortement ancré dans la culture havraise.

La balade : voyage au cœur d’un passé composite

Commune de départ : Le Havre (Seine-Maritime, Normandie). Type de balade : pédestre. Difficulté : facile. Durée : 1 journée. Distance : 4 km.

    1. Place Perret, rendez-vous à la Maison du patrimoine pour réserver votre visite guidée de l’Appartement témoin.
    1. Juste en face, sur la place Niemeyer, faites un tour dans l’enceinte du Volcan, qui abrite la scène nationale ainsi que la bibliothèque.
    1. Place du Général-de-Gaulle, prenez le temps de saluer la mémoire des Havrais tombés pour la France lors de la Grande Guerre, devant le monument aux morts édifié en 1924.
    1. Direction, ensuite, le boulevard François-Ier, là où la tour lanterne octogonale de l’église Saint-Joseph domine le ciel. L’édifice fut reconstruit dès 1951 par Auguste Perret.
    1. En descendant le boulevard François-Ier, nous arrivons quai de Southampton. Ici se trouve la fameuse « Catène de containers » du Havre, réalisée par le sculpteur Vincent Ganivet en 2017, pour les 500 ans du port.
    1. À quelques pas, le musée d’Art moderne André Malraux, expose une importante collection de maîtres, tels que Monet, Renoir, Manet, Boudin ou encore Pissarro.bloc

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